courrier des lecteurs

Loup: logistique et non exponentiel

18 avr. 2024

Les opposants au loup brandissent à tour de bras l’épouvantail de sa croissance prétendument «exponentielle». Cette notion, mal comprise, a été mise en avant dès septembre 2023 par le Conseiller fédéral Rösti et reprise par notre Président du Gouvernement.

Or, aucun phénomène biologique ne suit une loi exponentielle. Pas plus la croissance d’un être vivant, que la diffusion d’une épidémie, que la trajectoire démographique d’une population animale.

Tout commence par une croissance initiale lente, suivie d’une accélération, avec une brève phase d’explosion qui peut donner la sensation d’une fuite «exponentielle», mais qui sera vite freinée, amenant à une stabilisation. Ainsi, notre croissance «corporelle» est lente au début (enfance), s’accélère à l’adolescence pour bien vite se stabiliser (taille adulte). Cette loi est décrite par le modèle logistique, qui prend la forme d’une sigmoïde, soit d’un S très largement étalé.

Pas convaincu.e? Appliquons le modèle exponentiel aux loups suisses. La population a augmenté de 31.5% par an depuis la reproduction de la première meute en 2012, malgré les tirs légaux et le braconnage. En novembre 2023, le territoire helvétique comptait environ 300 loups. Un prolongement exponentiel de la trajectoire démographique 2012-2023 donnerait 2’000 loups en Suisse en 2030, 30’000 en 2040 et 500’000 en 2050!

Nos plus hauts dirigeants politiques induisent donc le public en erreur, attisant les peurs. Le loup étant très territorial, sa population est naturellement condamnée à stabiliser tôt au tard son effectif, limitée par les ressources alimentaires disponibles (chez nous les cervidés). Ainsi, de 32 meutes en 2023, la Suisse pourrait en accueillir le double, grâce à l’abondance des espèces proies…

Bien sûr, si on laissait faire la nature.

par Raphaël Arlettaz, Uni de Berne, Bramois